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La fabuleuse histoire de l’Ours (12)Arthur, le Roi-Ours, suite, les carnets de JJS, page 56

les carnets de JJS, page 56

La fabuleuse histoire de l’Ours (12)

Arthur, le Roi-Ours, suite.


Le Roi-Ours est pourvu également d’une mission essentielle : la médiation des forces magiques de la reproduction. L’identité mythique des parents d’Arthur est d’un symbolisme majeur : fils de l‘oie et du dragon, il est issu de l’accouplement de l’animal du ciel et de celui du dessous de la terre.


Autrement dit, il a sa légitimité dans l’intégralité du cosmos. Dans certaines versions, l’ours, autre animal provenant du dessous de la terre (la grotte) est l’élément paternel tandis que l’oie reste l’élément maternel. Le nom de la mère d’Arthur est Ygraine (issu du celtique gigren qui signifie oie). Le jeune enfant issu de leur union est alors un ours volant ou un ours-oiseau. Cet animal hybride, on le retrouve dans quelques contes et même sculpté dans des églises romanes, par exemple dans des chapelles dédiées à Sainte-Ursule. Sainte Ursule ? la Petite Ourse ! C’est à dire la constellation du plus haut du ciel !


Et la Sainte Ursule a conservé sa place dans le calendrier chrétien en automne (21 octobre), au début de l’hibernation, tout comme Saint Martin, autre nom de l’ours*

Ce n’est pas anodin car c’est à ce moment-là que le père de l’Ours disparaît après l’engendrement et que la naissance de son fils surviendra au beau milieu de l’été. Le Roi apparaît alors en pleine splendeur. Arthur naît au solstice d’été. On remarque bien la cohérence du récit mythique avec le calendrier et le rythme des saisons.


L’ours endosse alors le rôle de la puissance reproductrice. On retrouve cette fonction dans une multitude de récits et de contes où l’Ours enlève et féconde la Femme. Ce type de récit a perduré jusqu’à une période récente dans les contrées où l’ours était encore très présent, associé à des pratiques superstitieuses. L’ambiguïté résidait dans la nécessité de prémunir les jeunes femmes des viols et, en même temps, d’avoir besoin, pour la continuité de l’espèce, de la puissance de reproduction symbolisée par la force guerrière et animale.


Cette antique figure sauvage, celle de l’ours mythique, maître millénaire du rythme annuel, subsiste dans des rituels provenant du plus profond de la mémoire eurasiatique en Sibérie, en Laponie, et même chez les Aïnous du Japon, tous peuples ultra-septentrionaux. Les danseurs et les chamanes y sont masqués, portent des pattes d’ours. Certains voient là les origines lointaines des danses carnavalesques et même du théâtre.


L’ours est à la fois le dieu, l’ennemi et l’élément régénérateur. Tout comme pour le bison dans les plaines amérindiennes , la chasse puis les danses sacrées peuvent se terminer par un sacrifice rituel. En dépeçant l’animal et en mangeant la chair sacrée, la communauté communie. Elle renouvelle, réactive, pour ainsi dire, sa source, sa puissance et sa légitimité divine. Le démantèlement du dieu sacrifié se retrouve dans de très nombreux rites et religions. Les cultes d’Osiris, Mithra, d’Attis et celui d’Orphée, entre autres, constituent les « membres épars d’un très ancien culte de l’ours tel qu’on peut l’observer en Sibérie ou chez les Aïnous ».*


On peut même raisonnablement penser que le Christ, mis à mort rituellement, écartelé sur la Croix, et mangé en communion a pu supplanter le Dieu-Ours en lui « empruntant » quelques traits rituels. Le christianisme s’est installé à notre ère, non pas en effaçant les cultes anciens, mais en s’y glissant progressivement jusqu’à en dissiper l’origine. C’est sensible dans les lieux de culte, mais aussi dans les personnages et les symboles. Michel Pastoureau a fort bien démontré le processus de mise à l’écart du Roi-Ours au profit du Roi-Lion.


La légende d’Arthur a également subi la même opération. Sa christianisation s’est effectuée progressivement par le glissement de certains patronymes, la fusion avec d’autres mythes, la mise en cohérence avec l’enseignement chrétien au gré de contorsions, effacements et ajouts.


Une autre analogie? L’Ours voleur de femmes, est bien présent dans le rapt de la femme d’Arthur, tout autant que lorsque Tristan « kidnappe » Yseut. Alors y est-il pour quelque chose lorsque Pâris enlève la Belle Hélène à la barbe de Ménélas ? Un indice ? Homère nous dit bien que Pâris fut nourri dans sa jeunesse par une ourse !

Il faudra aussi revenir sur un personnage mythique « cousin » d’Arthur : Jean de l’Ours.

Et aussi s’intéresser à la déesse Andarta, la divinité dont le nom a été remplacée par les Romains pour une Dea Augusta à l’origine du patronyme de la ville de Die. Andarta ? Dans la tradition celtique, c’est le nom de… la Grande Ourse !



JJ Sagot


* M. Pastoureau L’Ours, histoire d’un roi déchu

*C.Gaignebet Le Carnaval


Cette page s’appuie sur les recherches et publications de Philippe Walter, universitaire, professeur de littérature médiévale, spécialiste de Chrétien de Troyes, et chercheur référent en mythologie comparée, anthropologie culturelle du Moyen-Age…


En illustration, peinture japonaise du XIXème siècle, culte de l’ours chez les Aïnous


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